jeudi, 3 janvier 2019
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Comment a progressé le pouvoir d’achat en France depuis l’arrivée de l’euro ?
D’abord très vite, dans le prolongement de l’euphorie de la fin des années 90, avec une hausse de 2,2% par an en moyenne jusqu’en 2002, porté notamment par les réductions d’impôts et la baisse d’un point du taux de TVA en 2000. Et encore, on parle ici de l’évolution du pouvoir d’achat par unité de consommation, auquel sont retranchés les effets de la démographie et de la composition des ménages. Si sa montée n’est pas linéaire, les incidents sont rares. Le plus important d’entre eux survient en 2001 après l’éclatement de la bulle Internet, mais le pouvoir d’achat reprend très vite son ascension. En revanche, 2003 est une année difficile, plombée par l’évolution de l’emploi et des salaires. Puis le pouvoir d’achat se redresse à nouveau avec la reprise de la mi-2003. La situation des entreprises s’améliore, l’emploi redémarre, les salaires suivent et le pouvoir d’achat est stimulé par le ralentissement de l’inflation. L’optimisme est de retour.
Cette tendance favorable perdure jusqu’à la fin 2007. Le bilan des 9 premières années de l’euro est remarquable avec un gain de pouvoir d’achat de 1,7% en moyenne par an pour les français. Du jamais vu depuis les Trente Glorieuses. Mais plus que l’euro, cette dynamique porte la marque de la politique économique sous Jospin et Chirac, celle de la consommation comme fer de lance de la croissance. Cependant, la contrepartie de cette stratégie de la demande, on le comprendra plus tard, c’est le sacrifice des comptes publics, c’est un système productif dont la compétitivité se dégrade et ce sont des échanges extérieurs qui virent au déséquilibre : les excédents commerciaux reculent pour céder la place à un déficit de 42 milliards en 2007.
C’est dans ce contexte que survient la crise financière de 2008. L’activité se dérobe, le chômage de masse fait son retour, l’inflation aussi : le pouvoir d’achat plonge de 1,2% en 6 mois, c’est une première depuis 1984. Cela dit, il faut relativiser au regard de l’ampleur du choc : c’est finalement très peu par rapport aux autres pays européens. Car dans la logique du modèle français de croissance par la demande intérieure, la réponse des pouvoirs publics ne change pas : Nicolas Sarkozy décide d’alléger la barque fiscale des ménages pour soutenir coûte que coûte la consommation. C’est ainsi que l’on défiscalise les heures supplémentaires et que l’on verse des primes exceptionnelles. Mais c’est le chant du cygne. Cette politique fait exploser le déficit public, qui dépasse les 7% du PIB en 2009, tandis que le déficit extérieur s’enfonce à plus de 70 milliards d’euros. Sous la pression allemande, des mesures de consolidation budgétaires sont prises au Sud de l’Europe. En France, c’est la douche fiscale qui commence. Dès 2011, sous Sarkozy, les hauts revenus sont mis à contribution avec la chasse aux niches fiscales et la taxation de l’épargne. D’autres mesures suivront sous la présidence Hollande. La flambée du chômage, couplée à l’austérité, pèsent alors de tout leur poids sur les revenus. Bilan, le pouvoir d’achat recule trois années de suite. Une grande première dans l’histoire économique de la France.
Et pourtant, la remontée survient en 2014 malgré un contexte économique toujours dégradé. Le pouvoir d’achat bénéfice en fait de trois coups de pouce. C’est d’abord l’inflation qui fait du rase-motte dans le sillage de l’effondrement des prix du pétrole. C’est ensuite le CICE qui s’est en partie transformé en une subvention indirecte aux hausses de salaires. C’est enfin, une pause dans l’alourdissement de la barque fiscale. Là, le mouvement va pourtant s’enrayer prématurément à partir de 2017 : retour de l’inflation dans le sillage de la forte hausse du prix du pétrole et de l’alourdissement de la fiscalité sur les carburants et le tabac, faibles revalorisations salariales, coups de rabots à tout va, sur le pouvoir d’achat des revenus d’inactivité (retraites, APL, allocations familiales) … tout cela efface les effets des baisse des cotisations salariales et de la taxe d’habitation.
Depuis la création de l’euro, il y a eu deux phases, l’une euphorique jusqu’en 2007 avec une hausse moyenne du pouvoir d’achat de 1,7% l’an, l’autre moins heureuse avec un très maigre 0,3%.